Dans le cadre de la digitalisation des usages, la dématérialisation des fonctions support devient une nécessité. Parmi elles, celle des ressources humaines (RH) est une priorité. De plus en plus d'organisations se lancent en effet dans un tel projet, complexe et multiforme, mais aux avantages nombreux, notamment à l'heure du RGPD.
Un dossier du personnel peut contenir entre 100 et 300 types de documents différents. Multipliez ce nombre par celui des salariés de votre organisation et mettez-vous maintenant à rêver : et si ces centaines de mètres linéaires occupés pouvaient disparaître en un instant ? Et ce en gagnant en efficacité tout en intégrant les exigences du Règlement général sur la protection des données (RGPD), qui entrera en vigueur en mai prochain ? Ce sont quelques uns des avantages d'un projet de dématérialisation du processus RH (ressources humaines).
Et c'est LE sujet du moment. Car dans le cadre de la transformation des usages dans les entreprises et collectivités, où la mobilité et l'accessibilité sont désormais les maîtres mots, de plus en plus d'organisations l'ont compris : faire évoluer les fonctions support, telles que les ressources humaines, vers la dématérialisation de leurs processus métier, devient une évidence.
Et ce qui était encore difficile hier, l'est désormais : tout peut être dématérialisé. En effet, à l'heure de la digitalisation, du courrier recommandé et de la signature électroniques, ou encore du coffre-fort numérique et du bulletin de paie électronique, tout document ou écrit électronique peut porter la même valeur probante que le document papier. C'est pourquoi dématérialiser les processus RH et les fonds documentaires attachés devient une véritable opportunité.
De quels documents parle-t-on ?
Le dossier individuel d'un salarié comporte les informations qui permettent notamment à l'employeur, au salarié ou à l'agent de remplir leurs obligations, mais aussi tous les documents qui jalonnent la vie d'un salarié dans l'entreprise, depuis son embauche jusqu'à son départ.
Sont donc concernées toutes les pièces produites et reçues contenant des informations individuelles relatives à chacun, soit de manière éclatée dans les services RH ou au sein d’un même dossier. Il s'agit notamment de tous les documents relatifs à l'état-civil (CV, diplômes, RIB, etc), à la paie (fiches de salaires, primes, demandes d'avances sur salaires, etc), au suivi administratif de la carrière (changement d'affectation ou de poste, formations, demandes de congés, tous les accords comme ceux sur le télétravail, etc), à la maladie (arrêts de travail, accidents du travail, etc), à la discipline et aux évaluations (rapports, blâmes, fiches de notation, entretiens annuels, etc) ou encore au départ du salarié (démission, retraite, etc).
RH vs informatisation ?
En complément de tous ces dossiers papier, la grande majorité des services RH utilisent aujourd'hui des systèmes d'information métier. Ces applications sont devenues des bases de données extrêmement complètes qui regorgent d’informations à jour et alimentées quotidiennement, dont des données personnelles.
"Aujourd'hui, il faut se rendre à l'évidence : la gestion administrative du dossier individuel n'a pas toujours suivi l'informatisation des processus métier", constate Caroline Buscal, responsable du "pôle RH" et manager du département Conseil de Serda. Pour le vérifier, faites le test et consultez votre service RH : il y a par exemple de grandes chances pour que votre RIB papier, remis à votre service RH lors de votre embauche, soit toujours conservé dans votre dossier. Vos données bancaires étant enregistrées depuis le virement de votre premier salaire sur votre compte, il n'est pourtant d'aucune utilité, et ce d’autant plus si vous avez changé entre-temps de coordonnées bancaires. Votre dossier a sans doute tout gardé.
Comment faire ?
"Se lancer dans un projet de démat RH passe par la mise en relation des applications métier et des systèmes de systèmes de Gestion électronique de document (Ged), poursuit Caroline Buscal ; et ce en intégrant un plan de classement fonctionnel et inspiré de la réglementation (par exemple, arrêté de décembre 2012 sur le dossier individuel des agents publics géré sur support électronique) pour les salariés d'une organisation".
Les objectifs d'une telle mise en oeuvre sont évidents : rendre possible la création d'un dossier individuel électronique grâce à l'établissement d'une chaîne complète pouvant même aller jusqu'à la création d'un coffre-fort électronique pour les fiches de paie (en accord avec les salariés) et autres documents contractuels (contrats, avenants, conventions, etc). Ceci implique d'intégrer des signatures et des parapheurs électroniques pour permettre d'apposer une valeur juridique aux documents conservés.
L'arborescence du dossier individuel doit pouvoir correspondre avec tous les volets de la gestion RH et avec les processus, pour en faire un dossier partagé avec tous les acteurs du domaine. Y intégrer le cycle de vie des documents est aussi une vraie évolution, qui permet à la fois de limiter dans le temps la conservation des informations et être en conformité avec les exigences du RGPD (pour rappel, un arrêt de travail n'a pas le même délai de prescription qu'un contrat de travail ou qu'une fiche de salaire).
Enfin, un projet de dématérialisation RH doit permettre la reprise des fonds papier les plus actifs, ceux qui sont alimentés quotidiennement. La prise en compte des flux entrants ou sortants est tout aussi complexe que la reprise des stocks de dossiers papier, "Ce type de projet est souvent conduit de manière progressive, poursuit Caroline Buscal ; elle doit permettre à la fois de faciliter l'accès aux dossiers et de tracer toutes les modifications, de préserver les documents et données en fonction des besoins ou obligations, et de favoriser l'appropriation de ce nouveau mode de fonctionnement".
Se faire accompagner
Les bénéfices d'un tel projet sont nombreux car il permet de couvrir tout le besoin d'un dossier individuel de carrière : acquisition, gestion, consultation et archivage. "De plus en plus d'organisations se lancent dans te tels projets, mais pas toujours de la même façon, ajoute Caroline Buscal ; il arrive que certaines préfèrent séparer leur applicatif métier de la Ged, ce qui est dommageable car dans ce cas l'intégration des flux n'est pas automatisée".
Multiforme, ce type de projet englobe différents axes qui doivent impérativement se concilier : juridique, documentaire, technologique, et humain, avec notamment tout ce qui implique de l'accompagnement au changement et aux nouvelles pratiques. "La démat RH ne se fait pas instantanément, conclut Caroline Buscal ; ce ne sont pas des projets que l'on mène en quelques semaines. Il est primordial de bien se faire accompagner".
Clémence Jost
Journaliste Archimag